LE PRÊT A USAGE

Le prêt à usage (anciennement appelé « commodat ») est un contrat par lequel une personne, (le prêteur), remet à titre gratuit à une autre, (l’emprunteur), afin qu’elle s’en serve, une chose non consomptible.  L’emprunteur devra restituer cette chose, après s’en être servi (article 1875 du Code civil).

  • Il est précisé que Le prêt à usage, porte sur des choses dont on peut user sans les détruire (« choses non consomptibles ») L’emprunteur a le droit d’user gratuitement et temporairement de cette chose.

Toutefois, il est tout à fait possible de prêter à usage une chose consomptible si l’emprunteur promet de ne pas la consommer : le prêt d’un objet en vue d’une exposition, par exemple…

  • L’objet du prêt se limite cependant aux choses, à l’exclusion des personnes. Le contrat de « prêt de main d’œuvre » par exemple, n’est pas un prêt à usage.
  • Le prêt à usage peut donc porter sur n’importe quelle chose du moment qu’elle n’est pas consomptible. Il peut s’agir d’un meuble (exemples : un vêtement, un livre, un ordinateur, un canapé, d’une maison…).
  • Mais c’est un usage temporaire : l’emprunteur n’en a que l’usage temporaire et s’engage à la restituer au prêteur après s’en être servi.
  • Et c’est un usage gratuit de la chose : c’est-à-dire, sans contrepartie.

Contenu du contrat

 

- Le prêt à usage doit respecter les conditions de validité des contrats de l’article 1128 du Code civil, c’est-à-dire : consentement des parties, capacité de contracter, contenu licite.

- Concernant plus précisément la capacité des parties, puisque ce n’est pas la propriété mais simplement l’usage de la chose qui est transféré, la conclusion d’un prêt à usage est un acte d’administration. Dès lors, la capacité d’administrer est suffisante pour consentir un tel prêt, et la capacité de disposer n’est pas requise. 

- Le prêt à usage est un contrat réel : il est formé par la remise de la chose à l’emprunteur. (tant que le prêteur n’a pas remis la chose, le contrat n’est pas formé).

- Le contrat peut être conclu verbalement ou constaté par écrit. 

- La preuve du prêt à usage obéit cependant au droit commun de la preuve des actes juridiques.  (Un écrit est nécessaire dès lors que la valeur de la chose prêtée excède 1500 euros, sous réserve de l’appréciation du juge).

Les obligations de l’emprunteur

 

L’usage de la chose :

  • L’usage est celui convenu par les parties dans le contrat. À défaut de convention expresse, l’emprunteur doit, en vertu de l’article 1880 du Code civil, faire un usage de la chose déterminé par sa nature. En cas de dépassement de l’usage ainsi déterminé d’une manière ou de l’autre, l’emprunteur engage sa responsabilité.
  • Par ailleurs, l’emprunteur ne peut pas transférer l’usage de la chose qui lui a été prêtée à un tiers.

 

La conservation de la chose

  • L’emprunteur « est tenu de veiller raisonnablement à la garde et à la conservation de la chose prêtée» (article 1880 du Code civil).
  • Les dépenses d’entretien de la chose sont à la charge de l’emprunteur (article 1886 du Code civil). Toutefois, ce dernier peut obtenir un remboursement de la part du prêteur pour les dépenses extraordinaires, nécessaires et urgentes exposées pour la conservation de la chose (article 1890 du Code civil).
  • En cas de dégradation ou de perte de la chose prêtée, l’emprunteur se doit d’indemniser le prêteur, sauf s’il rapporte la preuve de l’absence de faute de sa part ou d’un cas fortuit (Cass. Civ. 1ère, 1er mars 2005, n° 02-17.537), mais il n’y a pas de présomption de faute en cas d’usage conjoint de la chose par le prêteur et l’emprunteur (Cass. Civ. 1ère, 20 mai 2020, n° 19-10.559).

 

La restitution de la chose

  • ’emprunteur doit restituer au prêteur la chose qu’il a reçue et non une chose semblable.
  • Le moment de la restitution diffère selon que le prêt est à durée déterminée ou à durée indéterminée.
    • Si le prêt est à durée déterminée, l’emprunteur doit restituer la chose à l’expiration du prêt.
    • Si le prêt est à durée indéterminée, le prêteur ne peut demander la restitution de la chose « qu’après qu’elle a servi à l’usage pour lequel elle a été empruntée » (article 1888 du Code civil).
  • Quid des bijoux de famille au jour de la rupture du lien matrimonial ? L’intention du mari, était-elle de donner, ou bien de prêter pendant le temps où l’épouse ferait partie de la famille ? (Cass. 1ère civ., 30 oct. 2007, n° 05-14258, inédit).
  • Quid des emballages consignés ?: sont-ils seulement prêtés au consommateur ou font-ils l’objet d’une vente avec promesse d’achat ? La jurisprudence admet les deux solutions….Le consommateur peut très bien garder la bouteille, ou la jeter à la poubelle, en acceptant de perdre la consigne. Le prêt de l’emballage n’a pour objet que de permettre l’achat par le consommateur du produit qu’il contient…

Le remboursement des dépenses de conservation

  • Le prêteur doit rembourser à l’emprunteur les dépenses extraordinaires, nécessaires et urgentes qui ont été engagées pour la conservation de la chose(article 1890 du Code civil).

 

Le prêt à usage est traditionnellement un service désintéressé, ce qui explique que la gratuité soit de son essence.  

  • Cette gratuité distingue par exemple, le prêt à usage du bail : Par exemple, la remise d’une chose non consomptible en vue de son usage en échange d’un prix, est une location. Ainsi le « prêt » gratuit d’un chariot par une grande surface par exemple, n’est pas désintéressé, le consommateur qui a les mains libres achète plus… Dans ces conditions, ces mises à dispositions sont-elles encore des « prêts » ?

PRECISIONS

Le prêt à usage doit être distingué du prêt de consommation. Il existe en réalité deux sortes de prêt (article 1874 du Code civil) :

  • Le prêt à usage, qui porte sur des choses dont on peut user sans les détruire(« choses non consomptibles ») ;
  • Le prêt de consommation, qui porte sur des choses qui se consomment par l’usage qu’on en fait (« choses consomptibles ». Exemple, le prêt d’argent)

 

QUELQUES POINTS sur la FISCALITE de certains biens prêtés à usage

 

L’article 15 du code général des impôts dispose que les revenus des logements dont le propriétaire se réserve la jouissance ne sont pas soumis à l’impôt sur le revenu.

La documentation administrative BOI-RFPI-CHAMP-20-20 n°50 prévoit que ce texte s’applique dans le cas où le propriétaire d’un logement le met à la disposition gratuite d’un tiers, sans y être tenu par un contrat de location.

  • Compte tenu de cette absence d’imposition, le prêteur ne pourrait pas déduire de son revenu imposable les travaux et charges liés au bien prêté.
  • Sous réserve que le contrat constitue bien un prêt à usage, et non une donation déguisée, il permet de mettre gracieusement un bien à la disposition d’un tiers, en évitant les droits de mutation à titre gratuit de 60%.
  • En matière de taxe foncière, celle-ci demeure à la charge du propriétaire (article 1400 du code général des impôts). Si l’emprunteur la rembourse au prêteur, le contrat pourrait être re qualifié en contrat de bail.
  • Idem si le prêteur perçoit une quelconque rémunération de l’emprunteur, le contrat de commodat pourrait être re qualifié en contrat de location. Dans ce cas, les loyers constitueraient des revenus taxables pour le prêteur.